Pour ceux qui pratiquent ce sport depuis plusieurs années, l’expérience de l’escalade en extérieur va de soi. Pour d’autres, compte tenu de la forte augmentation du nombre de nouveaux grimpeurs au cours des dernières années, la transition entre le gymnase et la falaise peut sembler intimidante. Maintenant que le déconfinement a commencé, notre désir de nature sera difficile à contenir. Plus que jamais, l’escalade apparaît comme une solution évidente à notre sentiment d’enfermement qui s’amplifie depuis quelques mois.
Avec la popularité croissante de l’escalade de bloc, il y a certainement un besoin à combler en termes d’éducation de la prochaine génération de grimpeurs en plein air. Au Bloc Shop, vous trouverez des grades sur chaque problème et les zones de réception sont idéales. A l’extérieur, il n’y aura que des rochers, rien d’autre ! Je me souviens de ma première session outdoor : nous utilisions des petits matelas de lit enveloppés dans des sacs poubelles pour protéger nos chutes. Plutôt gênant, non ? Je vais essayer ici de vous donner quelques astuces et conseils qui m’auraient bien servi à l’époque. Pour les habitués, un petit rappel sur l’éthique et les bonnes habitudes ne fait jamais de mal.
L’ESSENTIEL
Commençons par l « équipement nécessaire. Si l » équipement nécessaire à la pratique de l’escalade semble bien maigre par rapport à d’autres sports, un simple oubli peut tout de même gâcher votre journée d’escalade. Les surfaces d’atterrissage au Québec sont généralement inégales et plutôt dangereuses, vous aurez donc besoin d’un crashpad (ou de plusieurs crashpads, si vous êtes honnête). Plusieurs options s’offrent à vous : grand, petit, épais, mince… De plus, en termes de qualité, certains sont beaucoup plus durables que d’autres. Nous vendons différents crashpads sur la boutique en ligne. Ils se vendent assez rapidement, il faut donc être prêt pour les nouveaux arrivages.
Il est évident que vous devrez apporter un sac à craie. De même, il n’y aura pas de brosses de 12 pieds qui vous attendront. Apportez la vôtre, vous ne le regretterez pas ; les prises deviennent rapidement glissantes sans brossage. Les plus motivés apporteront leur propre perche, d’autres se contenteront de scotcher leur brosse sur une longue branche pour atteindre les prises trop hautes. Inutile de préciser que vous aurez aussi besoin de scotch pour soigner vos pauvres doigts (oui, votre peau s’use très vite au début).
Compte tenu de notre proximité avec la région, votre première expérience se fera probablement dans la Mecque des Laurentides : Val-David. Le Parc Dufresne apparaît souvent comme la destination évidente, car il offre l’accès le plus facile ainsi qu’une pléthore de blocs en bonnes conditions. De plus, un guide bien écrit vous fournira toutes les informations nécessaires sur la région et les problèmes qui s’offrent à vous.
Il y a plusieurs aspects à prendre en compte avant de s’aventurer dans les forêts laurentiennes. L’un d’entre eux prime sur tous les autres : NE PAS LAISSER DE TRACES. Lorsque vous quittez un site d’escalade, celui-ci doit être plus propre qu’à votre arrivée. Vous rapportez vos déchets, et vous êtes invités à en rapporter d’autres. De cette manière, la nature reste propre et l’accès à l’escalade n’est pas constamment menacé. Si vous avez des amis qui vous emmènent dans une zone plus souterraine, gardez à l’esprit que la grande majorité des blocs en dehors de Val-David se trouvent sur des terrains privés. Soyez donc conscient de deux choses : vous n’avez probablement pas le droit d’être là. Deuxièmement, vous n’avez probablement pas le droit d’être là. Ce sera ma seule explication sur les délicats problèmes d’accès dans la région (c’est un sujet complexe qui alimente généralement la controverse), mais c’est quelque chose qu’il faut garder à l’esprit.
PARTICULARITÉS
Maintenant que nous avons parcouru les bases, nous allons survoler les particularités qu’offre « le grand air ». Si vous avez l’habitude de suivre les prises colorées et de terminer sur la cruche finale pour achever votre projet, disons que cela se passe un peu différemment à l’extérieur. Vous le saviez probablement déjà, mais votre cerveau mettra un certain temps à s’adapter. Quel que soit le niveau auquel vous grimpez en salle, vous vous retrouverez probablement à grimper quelques niveaux plus bas pendant un certain temps. Plusieurs facteurs entrent en jeu : les prises sont plus difficiles à voir, plus complexes à utiliser, moins positives, les mouvements sont plus difficiles à comprendre ou à imaginer, et les prises de pied sont beaucoup plus subtiles, entre autres. Compte tenu de la tangente sur laquelle évolue l’escalade en salle depuis une dizaine d’années, qui a pour effet de la différencier fortement de l’expérience extérieure en termes de style, la transition entre les deux mondes n’est pas toujours aisée.
Au début, il peut être difficile de comprendre la différence entre l’engagement et la difficulté. Un mouvement particulier est-il difficile parce qu’il nécessite un engagement important (par exemple un saut, de mauvais pieds, une hauteur inhabituelle) ou parce qu’il est simplement physique ? Ainsi, un topout V2 à 20 pieds au-dessus de la réception peut sembler aussi difficile qu’un mouvement V4 à trois pieds du sol. Il faut s’habituer à ce genre de situation, et c’est loin d’être instantané.
De plus, en raison de l’incertitude des prises de pied, les grimpeurs inexpérimentés ont tendance à chercher des prises de pied plus grandes plutôt que celles qui sont mieux placées. Il en résulte souvent des positions corporelles précaires et peu efficaces. Dans ce cas, votre niveau d’escalade s’améliorera considérablement lorsque vous travaillerez avec des pieds précaires bien positionnés. L’escalade à l’extérieur vous oblige à améliorer votre technique. L’inconnu est généralement source d’anxiété, vous serez donc moins confiant dans vos capacités qu’à l’accoutumée. Dans tous les cas, une bonne dose d’humilité ne fait jamais de mal.
Après avoir grimpé en salle pendant un certain temps, notre cerveau s’habitue à grimper en utilisant des prises relativement confortables, c’est-à-dire des formes organiques et arrondies. À l’extérieur, c’est plutôt l’inverse. Vous troquerez les gros volumes contre des prises petites, complexes et abrasives. Que ce soit à cause de la texture agressive, des arêtes vives ou de la position peu naturelle des doigts, tous les aspects de l’escalade à l’extérieur vous obligeront à reconfigurer votre connaissance de l’escalade. Tirer fort sur une pince douloureuse exige une capacité psychologique bien développée, ainsi qu’une certaine expérience pour reconnaître vos limites. De plus, le type de cal formé par le plastique est totalement différent de celui formé par le rocher ; la transition entre les deux nécessite quelques séances ! Tous ces petits détails, qui paraissent a priori anodins, marquent une différence notable entre les deux types d’escalade et rendent leur pratique bien distincte.

SÉCURITÉ
L’aspect le plus important est toujours votre propre sécurité et celle de votre partenaire. Il est évident qu’en escalade de bloc, vous ne tenez pas la vie de votre partenaire entre vos mains, comme c’est le cas lorsque vous grimpez des voies. En revanche, l’inattention ou le manque de précaution peuvent rapidement entraîner des blessures graves.
Tout d’abord, veillez à emporter suffisamment de crashpads pour protéger la zone d’atterrissage du bloc que vous souhaitez escalader. Vous aurez besoin d’au moins 2 ou 3 crashpads pour un bloc de hauteur moyenne avec un atterrissage sécurisé (c’est-à-dire sans dénivellation importante ni rochers). Selon le bloc que vous choisissez de grimper, vous pourriez avoir besoin de 5 à 10 crashpads dans les cas les plus extrêmes. C’est pourquoi, si chaque ami apporte 1 ou 2 coussins, il est assez facile de grimper en toute sécurité.
Ce n’est pas tout de s’allonger sous un rocher, encore faut-il bien le faire. Une cheville tordue est vite arrivée. Veillez à supprimer les trous entre les coussins. Veillez également à ce que la surface sous les protections soit aussi uniforme que possible. Un caillou de taille moyenne sous un sac peut sérieusement altérer la sécurité d’une chute. La plupart des crashpads ont un ou deux plis. Dans certains cas, il est préférable d’utiliser un crashpad « à l’envers », par exemple pour couvrir un rocher pointu. De cette façon, le crashpad formera un atterrissage plus naturel.
Vous devez prendre en considération le type de mouvement que vous souhaitez protéger. S’agit-il d’un mouvement dynamique latéral ? D’un talonnage haut et engagé ? L’axe de votre chute potentielle est l’élément le plus important à prendre en compte. Même les grimpeurs les plus expérimentés ne peuvent pas tout prévoir. Si vous n’êtes pas sûr de pouvoir protéger une chute spécifique, il vaut mieux attendre d’être plus expérimenté, d’avoir plus d’amis, ou plus de crashpads.
Enfin, l’approche est un autre élément à prendre en compte. Vous devrez prendre un certain nombre de risques à un moment ou à un autre de votre carrière d’escaladeur. Il est préférable de prendre ces risques sur un bloc situé à proximité de votre voiture. Après une heure d’approche sur des terrains rocheux, la prise de risque devient plus difficile à justifier.
ÉTHIQUE
Ah ! Enfin la partie croustillante ! Comme dans toutes les communautés, nous avons une éthique chatouilleuse. Il est généralement préférable d’être informé à l’avance que d’apprendre d’un grimpeur grincheux. Je pourrais écrire plusieurs pages sur l’éthique de l’escalade, mais il suffira de présenter une liste courte et non exhaustive d’éléments à prendre en compte. S’ils semblent anodins pour certains, ils sont d’une importance cruciale pour d’autres. Veuillez utiliser ces informations en combinaison avec un bon jugement.
L’utilisation des tickmarks est très courante à l’extérieur. Ces petites marques à la craie sous les prises sont utilisées pour améliorer la précision des mouvements et pour augmenter les chances sur les prises à faible pourcentage. Nous essayons de nous en tenir à des marques petites et subtiles qui seront faciles à effacer avec un pinceau. De plus, il est important de les effacer lorsque vous quittez le problème. C’est une question d’esthétique, et certains grimpeurs puristes aiment trouver des solutions sans aide extérieure ; nous essayons de respecter cela.
Lorsque vous grimpez avec un groupe de grimpeurs inconnus, essayez d’être poli et de laisser tout le monde grimper à égalité. De plus, et c’est très important, si un autre grimpeur effleure toutes les prises, il est généralement déconseillé de monter sur le problème avant lui. Ne le faites pas. A ce propos, ne touchez pas les prises sans avoir de la craie sur les mains.
Lorsque vous grimpez dans des zones déjà aménagées, les types de brosses acceptés sont limités. Tenez-vous en à la brosse à poils ou à la brosse en nylon pour éviter de dégrader les prises. Les différents types de roches réagissent différemment au brossage. Par exemple, le grès est beaucoup plus fragile que le granit. De même, les brosses métalliques ne sont utilisées que pour enlever la mousse lors de l’ouverture de nouvelles zones d’escalade et de nouveaux problèmes. Vous devez donc laisser ce type de brosse à la maison si vous visitez une falaise déjà bien développée.
Plus généralement, essayez d’être respectueux. Cela semble assez simple, mais nous oublions parfois les choses simples. La communication est essentielle. Vous avez le bêta parfait pour aider un autre grimpeur ? Il est préférable de demander avant de donner un bêta non sollicité. Vous voulez repérer un autre grimpeur ? Il est toujours bon de demander avant. Ayant été témoin de nombreuses situations embarrassantes par le passé, la règle d’or semble être de ne pas faire de suppositions sur les attentes des autres. Mieux vaut prévenir que guérir.
N’apportez pas votre musique à la falaise. C’est un sujet controversé, mais la plupart des gens s’accordent à dire que ce n’est pas une pratique acceptable, surtout s’il y a d’autres grimpeurs au même endroit.
Amusez-vous, ne vous prenez pas au sérieux et prenez le temps de découvrir les belles subtilités qu’offre la pratique de l’escalade de bloc en plein air.
